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Patrice Malavieille

L'usage du monde, de Nicolas Bouvier

Dernière mise à jour : 12 avr. 2021

Un livre indispensable.

Un voyage de près de deux ans dans les années cinquante à bord d’une Fiat Topolino qui mène Nicolas Bouvier et son ami Thierry Vernet de Belgrade à la Khyber Pass entre Afghanistan et Pakistan.

Le livre n’est pas un récit de voyage : c’est un voyage à lui tout seul. Un regard étonnement profond sur un monde qui n’est plus. Une curiosité, une intelligence, une chaleur humaine, une énergie, qui émeuvent dès les premières pages. Un lien intime s’établit entre le lecteur et le voyageur, qui demeure vivace bien longtemps après la dernière page. On en ressort meilleur, on ne voyagera plus jamais de la même façon.

A cela, il faut ajouter une écriture magnifique qui donne envie d’apprendre par cœur des passages entiers. Le mieux est de citer :

« Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres jusqu’au jour où, pas trop sur de sois, on s’en va pour de bon. Un voyage se passe de motif. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait. »

Ou encore après une étape épuisante : « Puis, à mesure que les nerfs se détendent et que le soleil descend, vous vient cette fatigue comblée, cette envie d’adorer, d’engager son sort, qui vous prend tout d’un coup et libère, à une profondeur que d’ordinaire on néglige, un surcroît de vie violente qu’on ne sait comment employer. Bientôt le cœur – cette pompe à émotion – s’apaise ; on le sent taper plus largement, fidèle sous les côtes, gros muscle qu’on a fortifié. »

Plus loin, parlant d’un autre voyageur rencontré : « Il avait surtout ce flegme – qui n’est qu’une forme de plus grande résistance – si nécessaire à la vie de voyage où les exaltés, les irascibles finissent toujours par se briser contre l’image qu’ils se font d’eux-mêmes. »

Pour couronner le tout, le livre est illustré des savoureux dessins d’une grande spontanéité faits par Thierry Vernet durant le voyage. A lire absolument.


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